Six heures et quart, le jour se
lève. Si seulement y’avait que le jour, mais le mari aussi se lève et
« plim…plam… les casseroles se cognent, la vaisselle couine, le micro-onde
sonne ; même pas besoin de réveil, pour bibi, il est gratuit et régulier,
du lundi au samedi et jusqu’à dimanche, sept jours sur sept, trois cent
soixante cinq jours par an et plus si bissextile.
Tu penses que ça me met en rogne,
même pas, depuis le temps que ça dure ! Et en plus, je me lève tous les
jours du pied gauche alors, la bonne humeur, ça me connaît.
Je ne t’ai pas dit, sa
grand-mère, c’était pire que tout. Tu dors tranquille et voilà la vieille qui
passe et repasse (pas le linge), mais avec ses talons et dès potron-minet,
c’est mieux pour sortir les gens de leur sommeil.
-
Buongiorno, hai dormito bene ?
Hypocrite va ! Tu voulais me
faire lever, c’est réussi ! Que j’aurais aimé lui répondre ça à cette
toupie.
C’est fou ce qu’on s’aimait elle
et moi, un prêté pour un rendu, ça m’aurait plu, œil pour œil, dent pour dent,
mais la pauvre vieille n’en avait plus de dents.
Et puis, vient la mère. Ah, sa
mère, parlons-en. Tout aussi bruyante et elle aussi, à six heures du mat… comme
le fils. Au nom de la mère et du fils et du Saint « bruit-bruit ».
Dormir dans cette famille, tu peux pas. Même avec des bouchons de cire
dans les oreilles. Le bruit passe les murs, transperce, atteint ton tympan, tu
sursaute, te retourne, mais ce bruit te poursuit encore et encore. Pas
possible, ils ont une batterie de cuisine immense dans cette famille, ils ont
tout sorti pour me faire quitter de mon lit ! Non, je persiste, je ne me
lèverai pas, c’est pas l’heure, sacré nom d’une pipe. Si ça continue, je vais
leur casser leur pipe à ces fauteurs de bruit.
Tu veux partir en vacances, louer
une maison à plusieurs, tu peux pas, là non plus, car Pépère va se lever aux
aurores et casser les pieds à tout le monde en effectuant son petit dèj… Tu
participes que tu le veuille ou non ou alors, tu loues un château fort avec des
murs de deux mètres d’épaisseur. Là, peut être tu seras tranquille. Quoique,
j’en suis pas sûre !
Je parle de déjeuner, et pour
l’instant, seulement du petit dèj… Mais à partir de neuf heures, Monsieur se
met aux fourneaux et « re-plim… re-plam… les casseroles, les verres, les
bouteilles, les tiroirs, je t’ouvre, je te ferme. Même avec la porte de la
cuisine fermée, les sons te poursuivent, ne te lâchent pas. Tu aimes ?
Mais, si, tu aimes ! Non, t’aimes pas, tant pis, fais avec.
Tu veux faire la « grasse
mat… », impossible, si les casseroles ne t’ont pas ouvert les yeux, il est
capable de prendre la corne de brume du bateau et t’en jouer quelques
sonorités avec un air plus que réjouit
de t’avoir enfin fait bouger.
La tête dans le brouillard, tu
émerges à peine, tu viens préparer ton chocolat du matin avec tartines et
confitures et te narines t’indiquent que c’est pas le moment, que c’est pas
dans la cuisine que tu vas déjeuner, tu dois t’expatrier dans le séjour ou… Ton
chocolat aura un goût de « tchoutchouka, de cassoulet, de coq au vin, de sardines
grillées. Impossible d’avaler une bouchée de ta tartine sauf si t’as les
narines complètement bouchées.
Je pardonne pas ça, mais
heureusement pour lui, sa cuisine est délicieuse ; Mais ne pourrait-il la
faire plus tard et avec moins de bruit. Je sais, c’est trop lui demander et en
plus, si j’en parle, il se fiche de moi ou me répond :
-
Puisque c’est comme ça, je ne fais plus à manger,
débrouille toi !
-
« Nardine amok ! ».
Anne Kitline
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